Sous la chaire de Pierre, le cœur d’une Femme.

par | 27 Sep 2021 | Chœur de Chair

Un certain nombre de voix s’élèvent dans l’Eglise elle-même pour demander qu’une plus grande place soit faite aux femmes ; cela vous semble-t-il légitime ?

Oui… Et non. L’église n’est pas une institution soumise à la compétition, avec des intérêts et des droits à défendre. Elle est un corps et ce corps est le Corps du Christ ; il est né du Oui d’une Femme à l’Annonciation et de son Fiat au pied de la Croix…  Donc, la question de la place faite aux femmes dans l’Eglise est une aporie car l’Eglise est Femme. Sans le Oui de Marie, elle ne serait Pas.

Mais n’est-il pas entendu que l’Eglise, qui est avant tout une société d’hommes, laisse peu de place aux femmes ?

Dieu écrit l’Histoire Sainte à travers les femmes. Mieux, Il s’y dit. Jusqu’à S’être incarné dans la plus humble d’entre elles, avoir creusé Sa Parole Unique à même sa chair. C’est inouï ! Aucune autre religion n’a dit cela. Nulle part, ailleurs que dans le christianisme, les femmes n’ont eu une telle liberté d’action et de parole : fondatrices de monastères, docteurs de l’Eglise, écrivains, visionnaires, mystiques, chefs de guerre. Pensons à Sainte jeanne d’Arc ou sainte Catherine de Sienne qui ramena la papauté  d’Avignon à Rome. Aujourd’hui, j’ai bien peur que les femmes ne s’égarent dans une course à l’égalité au lieu de cultiver cette liberté infinie née à la source de la Vie : l’Adoration. Marie de Béthanie, couchée aux pieds du Christ, est ce cœur qui écoute si cher à Dieu, où resplendissent la radicale gratuité de Sa Gloire et de Sa Grâce. Sans l’Amen de Marie, sans l’onction de Madeleine, les œuvres de Marthe restent stériles et tout apostolat, caduc. Thérèse de Lisieux le dit ainsi : « Dans l’Eglise ma mère, je serai l’Amour. » Jésus le confirme : « Elle a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée. » 

Dans la Bible les femmes n’ont-elles pas un rôle secondaire ?

 Elles n’ont pas de rôle ; elles ont bien plus que cela : une vocation, c’est à dire un Appel. Cet Appel n’est pas moindre que celui des hommes, au contraire. Bien plus qu’un vis à vis, elles sont leur face à face. Dès la Genèse, elles s’échappent des fonctions et des rôles justement que la caste sacerdotale voudrait leur imposer. Toutes ! Sarah, Rebecca, Ruth répondent « Me voici » au grand Appel de Dieu. Mieux qu’Abraham, cette Promesse prend chair en elles : dès l’origine, leur maternité s’embrase d’une vocation prophétique. Dieu y tisse de siècle en siècle la tunique de la Rédemption. Au regard de Dieu, Cette maternité est  spirituelle, surnaturelle. Elle s’ordonne autour d’une Royauté qui n’est pas de ce monde mais qui porte le monde : Celle du Christ. Et puis, il y a les héroïnes, les combattantes, les prophétesses, Esther, Judith, Yael, Deborah qui déjà, à l’instar de sainte Jeanne d’Arc ou sainte Geneviève de Paris, sauvent le peuple d’Israël  des tyrans, des guerres fratricides ou de l’anéantissement.

Quelles sont les grandes saintes que vous admirez ?

Les plus petites, justement. Les plus humbles. Jésus n’a t-Il pas dit : les derniers seront premiers ? Je vous taquine un peu mais à peine ! Je pense à ces enfants inconnues, obscures, oubliées… Les martyrs des premiers siècles dont les visages remontent des grandes eaux de l’Histoire : Sainte Blandine échappant aux dents du lion ; sainte Philomène, la petite sainte du curé d’Ars, sainte Agathe et sainte Lucie… la ronde de ces vierges enfantines dont le courage défia la torture et la mort… Leur détermination dans la Foi est un exemple pour notre siècle enlisé dans la tiédeur et le relativisme. Je pense bien sûr à la bergère de Domrémy, sainte Jeanne de France, dont le cœur  tout vif  battait encore au lit des cendres du bûcher ; je pense à la petite sainte de Palestine, Myriam de Galilée ou sainte Gemma Galgani, stigmatisée d’amour… Je pense aux saints enfants de Fatima, ou à sainte Bernadette qui ne savait ni lire ni écrire… Bien d’autres encore, anonymes, peut-être, portant l’Eglise de leurs prières et de leur espérance. Et puis je pense aux intouchables… Les marginales, les lépreuses, les prostituées, les possédées, qui pour le Christ furent les joyaux de Sa couronne et les cariatides de Son Eglise.

Y a-t-il selon vous une spiritualité spécifiquement féminine ? Quelles en seraient les traits ?

La femme est « sentinelle de l’invisible » pour reprendre un terme inventé par St Jean-Paul II. Cet amour ne dort jamais. Il veille au cœur de la Croix, de toutes les croix du monde, pour annoncer la liberté ressuscitée. Cet amour affronte tous les dangers : la tiédeur, la peur, la mort. Au pied du calvaire, les disciples ont fui… Seules les femmes demeurent, avec saint Jean l’évangéliste.

Cette meilleure place qui échoit à la femme est celle de l’Adoration silencieuse, mais aussi celle de l’apostolat et de la parole : Marie Madeleine est le tout premier témoin de la Résurrection ; surtout, elle est l’unique envoyée pour annoncer le Ressuscité aux apôtres apeurés. Elle est l’Eglise de la Transfiguration… Déjà. Cette parole féminine naît au silence inviolé du Brasier trinitaire, en deçà de toute articulation. L’éternité la baigne en Son berceau.

Il y a la question de la femme dans l’Eglise mais évidemment aussi dans la société. Pensez-vous que les féministes mènent le bon combat ?

Le combat est perverti  par  une confusion cyniquement entretenue  par la culture consumériste entre égalité et parité. Le mot égalité est biaisé ; je préfère celui d’équité ; car l’équité n’est pas l’uniformité. Ou la conformité. L’équité respecte l’altérité. Infiniment. Pour quoi se battent les femmes ? Dans l’Eglise ou dans le monde séculier ? Se battent-elles pour l’altérité, la vraie, celle qui rime avec leur liberté? Se battent-elles pour la dignité de l’Homme, créé à l’Image de Dieu Qui S’est fait Chair dans l’une d’entre elles ? Cette humanité graciée, elles en sont les gardiennes : et elle ne peut pas être réduite à des algorithmes financiers ; elle ne peut pas être utilisée comme un matériau pour les pionniers de la techno-science ou de la génétique. Le seul combat à mener, la vraie révolution est le rapatriement de l’homme et de la femme dans leur unité qui est une communion, à l’image de Celle d’Adam et Eve et de la Trinité. Incandescente et éternelle.

Avortement, PMA, GPA on a l’impression d’une accélération de la destruction tout ce qui unissait la femme à la maternité. Qu’en pensez-vous ?

Ce que les femmes n’ont pas compris mais que certaines pressentent déjà, c’est que leur féminité, leurs entrailles, leur ventre est un cœur : et que dans ce cœur bat le Chœur du monde. Les marchands du temple de nos corps voudraient s’approprier ce tabernacle de la conception, où Dieu Se dit, où Dieu tisse jour après jour, l’avenir de l’Homme. Je frémis au souvenir de cette phrase de Pierre Bergé d’une violence inouïe : « les ventres des femmes se louent comme des bras d’ouvriers » Quel cynisme et qu’elle sacrilège ! Là est le véritable blasphème ; il est d’ailleurs un contrepoint à la profanation de l’Hostie. L’amour ne se vend ni ne se loue. Comme le dit le Cantique des Cantiques : « celui qui croit acheter l’amour ne  recevra que mépris. » Le ventre des femmes ne sera jamais une terre à conquérir ou à coloniser. Sa maternité justement n’est pas un esclavage. Elle est une grâce s’inscrivant dans une liberté invincible. La vie humaine ne se fabrique pas, ne se congèle pas, ne se trie pas dans des banques humaines. Tous ces acronymes PMA, GPA, IMG masquent un eugénisme institutionnel, légitimant la mort des plus petits, des invisibles et des sans voix… Ils sont les diktats fondateurs d’une civilisation transhumaniste, jetant sur le marché le corps des femmes. Et ce corps est le temple que Dieu a choisi pour y inscrire Sa Loi.

Peut-on faire un lien entre l’inimitié entre Satan et la Vierge Marie et cette obsession moderne de destruction de la maternité ?

Oui, Satan est jaloux de la Femme. Son prénom, Lucifer veut dire : porteur de lumière. Cette Lumière, je crois qu’il aurait aimé en être l’enceinte comme le fut Marie… Mais pour l’absorber toute entière, l’annihiler peut-être. Alors, à défaut d’avoir été le tabernacle de cette lumière, à défaut d’avoir pu l’étreindre et l’éteindre,  il tente d’arracher la création à Sa Grâce. Il tente de couper la vie, de l’acte qui l’origine : l’Amour de Dieu. Or cet Amour de Dieu pour l’humanité S’est dit dans la conception immaculée de Marie et depuis, dans toutes les conceptions humaines. Le sein de la femme devient donc l’enjeu du premier et du dernier combat : là, adviendra ou se suspendra la fin de l’Homme. Le programme de Satan est un programme de mort et il se farde toujours de nobles intentions ou d’idéaux désincarnés. Mais en réalité le but de l’ange rebelle est « la solution finale. »Pour toute l’humanité.

La femme en général et Marie en particulier est donc le cœur de l’Eglise ?

Oui, la femme est son cœur et son chœur : cœur battant soulevant le Chœur de pierre, mais  chœur  de louange aussi. N’oublions jamais ! Elle a été créée dans un écrin, dans un Jardin. En Eden. Elle a été tirée de la chair d’Adam et non de la glaise. J’ose affirmer ceci : Adam est l’ébauche, Eve son couronnement. Voilà pourquoi le serpent s’adresse à elle : ce n’est pas parce qu’elle est la plus faible, mais au contraire parce qu’elle est la merveille de Dieu, la clef de Son Cœur. En elle, sous l’arbre de la mal- édiction, se dessine déjà le Visage du Rédempteur. De Sa Bénédiction. Et cette bénédiction, c’est Son Eglise. Marie en est l’icône. Elle est son cœur, le fameux Cœur de chair promis à Ezéchiel, à Jérémie, à tous les prophètes : Je leur donnerai un même cœur; J’ôterai de leur corps le cœur de pierre, et Je leur donnerai un cœur de chair, afin qu’ils suivent Mes ordonnances, et qu’ils observent et pratiquent Mes lois; Et ils seront Mon peuple, et je serai leur Dieu. (Ez 11, 19- 20) Si « la femme est l’avenir de l’Homme », Marie est l’incarnation de la Grâce et la dépositaire d’une Promesse inouïe : L’Eternel Dieu dit au serpent : Je mettrai l’inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité: celle-ci t’écrasera la tête, et tu lui blesseras le talon. (Gn 3-15) La Chaire de Pierre est tissée de la chair d’une Femme toute pétrie de la  Grâce de Dieu. Voilà pourquoi l’Eglise est invincible. Les puissances de l’enfer ne l’emporteront pas sur elles. Sur cette pierre le Christ a construit son église ; sur les douze tribus d’Israël et sur les noms des douze apôtres, Il a établi Ses fondations. Mais c’est le Oui d’une Femme Qui les a portées, et en son Fiat, viennent fleurir les oui de toutes les femmes passées, présentes, futures. En son fiat, S’ouvre l’éternité.

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