172 pages – 15,30 €
Dimensions : 14 cm x 21 cm
ISBN-13 : 978-28-894-9185-8
Date de parution : 07/2020
Préfaces, autres textes
L’Obsolète
Ilan est un enfant précoce de 16 ans, fils d’un juif et d’une chrétienne. Sa petite amie est musulmane.
L’année du BAC sera décisive pour lui, avec, au-delà de l’enjeu des révisions, le magnifique chemin initiatique qu’il fera avec Zafira. L’univers des réseaux sociaux, le langage du chat sur l’écran de leur Iphone, seront pour eux des atouts supplémentaires de connaissance non dénués de poésie et d’humour.
Dans une quête assoiffée et pure, à la lisière du réel, de l’impalpable, face au Dieu de leur père, et donc, face à eux-mêmes, ils s’ouvriront à la vie.
« Les mots sont de formidables chapeaux, ils contiennent tout, dans l’illusion. Alors, je me méfie. Souvent je ne sais pas quoi dire, j’ai peur de me tromper, et utilise le silence comme on use du vent pour balayer la cour. Quand le désordre des paroles aura envahi le mur, quand nos cœurs auront trop pleuré et que nous serons las de nous lamenter, alors le silence y pourvoira. » Ilan Callman.
Diplômée des beaux-arts, Anne FLEURY-VACHEYROUT a étudié avec Christian Boltanski. Tout en menant une carrière de journaliste, elle présente ses travaux à Londres, New-York, Barcelone, Paris et Norfolk (Virginie). Ses recherches plastiques la mènent naturellement de la page blanche à l’écran où elle manie l’image avec un réel plaisir. Aujourd’hui, conjointement à son activité de vidéaste, elle poursuit son travail d’écriture au milieu d’un atelier-bibliothèque qui reste sa source vive.
PREFACE DE L’OBSOLETE
La lettre qu’Anne Fleury m’adressa pour que je préface L’obsolète, ressemblait à un flacon lancé à la mer… je la reçus en plein confinement… D’île en île, elle avait vogué jusqu’à la mienne, et elle m’était parvenu, avec en son cœur, ce manuscrit étincelant comme un sourire de Dieu, Grâce imprévisible où se dévoilait la Providence. Elle m’y confiait qu’elle avait un « piston au Ciel », qu’il s’était ouvert depuis que Lucas l’y attendait… Lucas, son enfant perdu dans un abîme des Alpes un lundi de Pâques, jour mystérieux où la mort s’était invitée, en cette fête de la Résurrection. Désormais ce n’est plus Anne qui met au monde Lucas, c’est Lucas qui enfante Anne au fil des mots de ce livre lumineux, tissé d’une étoile à l’autre, d’une blancheur à l’autre de ces pages ouvrant la nuit où, de l’autre côté, la Vie attend le bleu inentamé…
Ce Oui par-delà l’horizon de la mort.
« Je veux devenir architecte d’alphabet. Chercheur d’étoiles si tu préfères … je le sais véritablement, je veux dire dans mon for intérieur, que ma force viendra du ciel. Alors j’y mets mon nez, là, tout de suite, je l’écris sur mon papier recyclé ; je veux travailler dans le ciel. »Ces mots sont ceux d’Ilan, l’obsolète comme il se nomme, pseudo Détail sur les réseaux sociaux, un adolescent trop clairvoyant pour ce monde, pour « la vie d’ici-bas, celle qui ne sait rien pardonner. » Ilan a seize ans et six mois, Lucas en avait quinze, mesure de ce temps trop peu écoulé et que l’éternité a cueilli en plein vol.
A quatre ans déjà, Ilan observe méticuleusement les trous dans les murs de sa classe, il traque le circuit des tuyaux et des fils s’y engouffrant comme dans un tunnel. Où courent-ils ? Qu’y-a-t-il au-delà de tous ces murs ? Du mur du son, du mur du temps ? Et de l’espace ? Quoi, avant le Commencement ? Et par-delà le vide ? Le rien n’est-il pas un plein comme la lumière absolue contient les reliefs et les ombres, et le silence enfante les sons ? Qui l’attend en-de-ça de la perspective où des voies parallèles courent sans jamais s’étreindre, courent… vers un point de fuite qui est une fiction ? Spéculation arbitraire ordonnant l’architecture minutieuse de postulats enfermés dans l’abstraction. Enfer. De la vie disséquée. « Et moi, je me faufile partout où le vide m’aspire, le vide aspire à être rempli. J’ai compris cela tout petit, quand, sous les draps, j’arrivais à voir la lumière.»
L’obsolète… c’est aussi le nom de son meilleur ami. C’est ainsi qu’Ilan baptise un vieil ordinateur abandonné au fond d’une cave et qu’il éventre pour initialiser sa mémoire vierge de robot. Bientôt, le cœur de quartz caché aux labyrinthes algorithmiques bat à l’unisson du cœur de chair d’Ilan. Avec l’obsolète, Ilan part à l’assaut du ciel, par-delà les zones frontalières du monde, par-delà ses quadrillages bavards spéculant le Réel mais ne s’unissant pas au silence inviolé du Verbe Qui le porte.
Ilan prend le large. Des gares s’ouvrent, effilochant des territoires où s’invite l’Inconnu. Multiplicité des halls aux cœurs perdus dans le zapping au rythme saccadé, fragments de vies s’offrant l’une à l’autre. Ilan cherche le Ciel… le Ciel cherche Ilan. L’impossible ouvre ses rails traversant les pages et les murs. Fils entrecroisés des quais sillonnant l’immensité de la Toile d’où jaillissent en flux hypnotique, les wagons et les trains. De quai en quai, de train en train, Ilan cherche le Ciel. Il apparaît soudain, sur « la joue bleue et froide » d’une fenêtre s’arrachant, dans l’éclair d’une présence, au fil syncopé des pages clignotant dans la nuit monotone… il apparaît dans les yeux de Zafira, une jeune fille musulmane. «Je ne veux boire le ciel qu’au miroir de ses yeux», dira Ilan…Et le Ciel fera en lui Sa demeure. « Les tunnels sont des puits de lumière plus ou moins longs, suffit juste de marcher et on finit par arriver au soleil ou dans le regard de Zafira (…) Je venais d’ouvrir les yeux et mon corps se déplia dans un bruit de chrysalide. »
Le visage de Zafira, le regard de Zafira, le cœur de Zafira est un cantique à Ciel ouvert… Dieu l’écrit de Sa Lumière « Je lisais Zafira comme maman lisait la Bible.» Ilan s’y tient, émerveillé, au seuil d’un jardin où Dieu leur tisse une peau tressée à Son éternité… L’alphabet de Dieu les épèle et les appelle, au silence où germent à l’infini des mots inexplorés… horizons nus. Là, Ilan et Zafira, inventent leur vie, baignée dans la Vie d’où «avant » et « après » sont bannis, baignée à rebrousse fil du temps la séparant de sa virginité.
La Présence exige leur présence donnée toute entière, pour Se donner. Elle est la faille, la fêlure… Si simple et infinie qu’elle est l’infime, la ténue. Seuls les cœurs d’enfant peuvent S’y glisser, Y demeurer. Là, Ilan naît dans le regard de Zafira et Zafira naît dans le regard d’Ilan. D’aube en aube, comme au premier matin du monde, l’Amour sépare les grandes eaux, les enveloppant de son manteau au firmament des temps.
A l’horizon, un Homme marche sur l’azur du Ciel et de la mer ouverts.
L’Homme marche à Ciel ouvert. Il marche…
Eveil.
La Lumière unit d’un rayon bleu le caléidoscope des mots épars … « Dialecte des pauvres, le langage des petits oiseaux qui grapillent des mots éclairs dans le vif du vent. » Puis le silence les avale tous. L’amour se déploie tel un vitrail embrasé de foudre et d’or … L’éternité s’avance.
Enfin.
« L’amour est un savant algorithme. Toi, Zafira + moi, Ilan, par la fonction d’amour = 1. »
J’ai achevé cette préface le Dimanche 14 juin… C’était la Fête du Saint Sacrement… je l’ignorais encore. Je suis sortie pour me rendre à la Messe et juste devant la porte de mon immeuble, face à moi, sur le trottoir, étincelait dans le soleil du soir le mot P A R A D I S. Les lettres avaient été inscrites à la craie multicolore, par un enfant, un cœur en guise d’horizon. Ce mot m’étreignit comme un baiser de Dieu, lancé en plein vent par Lucas qui me disait : Merci. Dieu n’est-il pas dans les toutes petites choses comme l’ont dit la petite Thérèse et Georges Bernanos.
Véronique Lévy
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